Fondé et dirigé par le charismatique chef religieux et commandant d’origine fassi Sayyid Muhammad ibn Ali al-Idrisi, de 1908 à 1930, l’émirat Idrisside d’Asir s’étendait sur le Jīzān et le Tihama dans la province éponyme, en actuel Arabie Saoudite et Yémen.
Généalogie
Sayyid Muhammad ibn Ali al-Idrisi est issu d’une famille noble dont la généalogie remonte à Idriss I, fondateur de la ville de Fès et premier souverain marocain. Il est notamment le petit-fils de Ahmad ibn Idris al-Fasi, un érudit islamique soufi originaire de Fès, qui a étudié à la prestigieuse université Al Quaraouiyine et a œuvré au Maroc puis au Hedjaz.
Il a marqué son époque en tant que fondateur de la « Idrisiyya » un ensemble de traditions et de confréries soufies. Par l’intermédiaire de ses disciples, elle a exercé une influence diffuse qui s’étend dans le monde musulman. Il aménage à Zabīd au Yémen, qui historiquement a été un grand centre de l'érudition musulmane et meurt en 1837 à Sabya, qui devient plus tard la capitale de l’émirat sous le règne de son petit-fils.
Contexte
Au début du 20eme siècle, le Proche-Orient était presque entièrement sous la domination de l'Empire ottoman. La situation évolua durant la Première Guerre mondiale à travers la confrontation entre l'Entente (Royaume-Uni, France, Russie) et les Empires centraux (Allemagne, Autriche-Hongrie, Empire ottoman). Avant l’arrivée de Muhammad al-Idrisi à Asir, il ne semblait pas y avoir de facteur unificateur présent parmi la population. Gouvernée par les ottomans, la région de Asir était en anarchie en ce temps-là, un sentiment antiturc se préparait, déclenchant des conflits ethniques et sectaires entre les dirigeants ottomans et les habitants locaux. L’ascension de l’état Idrisside à Asir pourrait être perçue comme une continuation des rébellions tribales contre la domination ottomane.
Muhammad al Idrissi a alors commencé à répandre les enseignements de son grand-père et a encouragé les habitants locaux à maintenir une adhésion plus rigoureuse envers l'islam. En 1908, al Idrissi gagne le statut d’Imam et de nombreuses tribus de la région d'Asir le reconnaissent comme chef spirituel puis chef de guerre. L’année suivante, il commence à mettre en place ses premiers efforts pour renverser le pouvoir ottoman dans la région. Suite à cela, les troupes Idrissides réussirent à prendre les îles Farasan, des villes et rallier plusieurs tribus. Sa montée en puissance, a conduit à la pacification entre les Ottomans et les Idrissides. Dans le traité d'al-Hafa'ir, Al-Idrisi obtient le titre de Kaymakam d'Asir, ce qui en fit de facto un dirigeant semi-indépendant de la région sous la suzeraineté ottomane.
Cependant, suite à des négociations avec l’Italie, les forces de Sayyid Muhammad entrent en conflit ouvert avec les forces ottomanes à Abha. Les Idrissides sont vaincus en 1911 par les forces hachémites sous les ordres de Hussein ibn Ali, chérif de La Mecque, encore fidèle aux Ottomans. Cependant, le vent tourne lorsque Sayyid Muhammad conclut une alliance militaire secrète avec la Grande-Bretagne, alors en guerre avec les Ottomans en 1915. Par la suite, Sharif Hussein change de camp, et rejoint les Britanniques pour s’opposer aux Ottomans. Sa campagne militaire fut un succès et à la fin de la Première Guerre mondiale, Sayyid Muhammad devient gouverneur d'un État souverain reconnu internationalement comme l'émirat Idrisside d’Asir.
Fin de l’émirat
Après la chute de l’empire Ottoman, la péninsule arabique était saisie par des rivalités internes et il était clair que l’Angleterre n’était plus en mesure d’honorer ses engagements ce qui constituera un facteur du déclin de l’émirat. De surcroît, la souveraineté de l’émirat de l’Asir était menacée par la contemplation de Hussein bin Ali, roi du Hedjaz et par le Yémen dirigé par l’imam Yahya. Le décès de Muhammad ibn Ali Al-Idrisi suscitera une querelle familiale pour le trône. Dès lors que le nouvel émir, Al-Hassan, est arrivé au pouvoir, les dirigeants du Hedjaz et du Yémen ont revendiqué les possessions Idrissides.
En juin 1934, les Saoudiens et les Yéménites ont signé un traité d'amitié et de fraternité entre l'Arabie saoudite et le Yémen prévoyant l'établissement de relations pacifiques et diplomatiques entre les deux pays. Le traité prévoyait également la démarcation des frontières entre les deux pays, qui fut achevée en 1936, et ainsi les terres de l'émirat d'Idriss furent divisées provoquant donc sa dissolution.
The Idrisi State in Asir : Politics, Religion and Prestige in Arabia |Anne K. Bang | 1997
The Encyclopaedia of Islam (Second Edition) | Headley | 1954-2005